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TANNHÄUSER

absolue la question wagnérienne et met l’imbécile snobisme hors de cause. Nul n’ignore, en effet, qu’à cette heure les snobs sont très divisés au sujet de Tannhäuser. Tandis que quelques-uns d’entre eux admirent et respectent cet ouvrage, les autres le méprisent ouvertement. C’est donc moins à une œuvre de Wagner qu’à une œuvre d’art que le public a imposé justice et rendu hommage, proclamant avec une superbe violence la vitalité du génie, quel qu’il soit, décrétant avec une souveraine rudesse l’immortalité du beau, d’où qu’il sorte, où qu’il aille, promettant ainsi aux courageux, aux forts et aux combatifs la conquête de l’avenir.

Ah ! l’avenir, ce noble mot de mystère et de rêve, d’espoir et de confiance en le travail, a-t-il été assez profané dans les conversations comme dans les écrits, lors de la première représentation de Tannhäuser à l’Opéra ! Ayant eu la curiosité de parcourir la collection des journaux du temps, j’ai été moins écœuré par la mauvaise foi des comptes rendus, la prudence des abstentions, la bêtise des caricatures, le mercantilisme, déjà furieux, des feuilles d’éditeur que par la boue répandue peureusement sur la « musique de l’avenir », dont, pendant des années, on fit une cible aux plus ineptes moqueries et aux plus basses insultes.