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MUSIQUES D’HIER ET DE DEMAIN

Oui, peureusement, car la terreur de l’inconnu, l’effroi du lendemain percent sous ces injures et ces plaisanteries. Les facilement heureux d’alors sentaient bien que l’art nouveau, en un grand souffle d’idéal et de vérité, balayerait les productions conventionnelles et fausses dont le public était déjà las, mais qu’il subissait faute de mieux. Et elles furent balayées, en effet, par la « musique de l’avenir», devenue aujourd’hui la musique du présent, la musique de toujours, alors que ce qui aurait pu prendre place dans la musique du passé, glorieuse elle aussi, n’est déjà plus que poussière. Recherchez-les donc, dans les annales du théâtre de 1861, les ouvrages que la critique de cette époque recommandait et patronnait et qui étaient joués plusieurs centaines de fois tandis que Tannhäuser déchaînait des tempêtes de colères et disparaissait de l’affiche à la troisième représentation. Yous trouverez, il est vrai, l’adorable Statue, de M. Reyer, qui reste une exquise chose, que l’Opéra-Comique ne peut manquer de reprendre. Quant aux autres, votre surprise égalera l’ignorance où vous serez du nom de leurs auteurs. Non seulement il est consolant de penser que le laid ne triomphe point du sublime, mais il est bon de rappeler que l’on n’outrage pas impunément l’avenir. Les pauvres êtres qui n’en font pas cas et qui