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LA FOLLE EXPÉRIENCE

Philippe avisait, sous le lit, une pile de journaux. Le séminariste s’en aperçut :

— Ce sont des journaux français, Candide, Gringoire, qui préparent à leur façon le retour de l’ordre dans mon pauvre pays. Malheureusement, ils s’adressent à un public perverti, et c’est pourquoi ils se pensent obligés, pour faire avancer la bonne cause, de glisser des nouvelles et des dessins immoraux. Dieu jugera de leurs intentions. Des grands écrivains comme Bourget et Bordeaux ont bien été obligés de proposer leurs leçons morales au moyen d’histoires impures d’adultère.

Le séminariste prononçait avec une telle horreur le mot d’adultère que celui de sodomie venait immédiatement à la bouche de Philippe. Il se contint, il ne voulait pas rater sa quête.

— J’ai la permission de mon confesseur, vous savez ! J’ai même obtenu celle de lire tout Maurras. Celui-là nous reviendra, soyez sûr, il pense trop bien, et il en a tellement converti : Dieu ne peut lui tenir rigueur.

La conversation commençait à paraître longue aux impatiences de Philippe, qui, sans préambule, aborda son histoire : il la composait au fur et à mesure :

— Vous avez été prêtre…

— On n’a jamais été prêtre, on reste prêtre, je n’ai été que séminariste…

— Je vous demande pardon. Mais vous étiez digne d’être prêtre. Je veux vous demander