Page:Brunetière - Cinq lettres sur Ernest Renan, 1904.djvu/18

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furent, au vrai, l’écrivain, le philosophe, le moraliste, l’historien, et — puisque « penseur » il y a — le penseur que l’on va défigurer, dimanche prochain, à Tréguier.

De l’écrivain, ou du styliste, oh ! de l’écrivain, il n’y a que merveilles à dire, et je ne sais si le siècle qui vient de finir en aura connu de plus grand ; — les rangs sont toujours difficiles à donner ! — mais il n’en a pas connu de plus séduisant. Je ne suis malheureusement pas ce qu’on appelle un « grand Grec » et, si c’est une prière que la Prière sur l’Acropole, j’en préfère d’autres ! Mais, je le disais encore l’autre jour, et ce n’était pas pour la première fois, si quelqu’un, en notre langue, nous a rendu la sensation de cette abondance facile, de cette suprême aisance, de cette élégance familière et pourtant soutenue, de cette grâce enveloppante et souple, de ce charme insinuant et quelquefois pervers, de cette ironie transcendante qui furent, dit-on, les qualités, ou quelques-unes des qualités du style de Platon, c’est Renan ; et je n’en sache pas un autre dont on le pourrait dire[1].

  1. Un jeune journaliste (et je l’appelle « jeune » parce qu’il n’est pas vieux) m’a sur ces paroles accusé de « contradiction » ; et