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THÉORIE DU LIEU COMMUN.

de quelques années, il était devenu tellement Anglais qu’il en avait désappris le français. En dépit de ce mémorable exemple, il reste vrai que jamais peut-être on n’a plus arbitrairement que depuis la diffusion de ces principes de haute critique, mesuré chacun toutes choses à sa mesure personnelle. Comme nous avons eu rarement l’occasion de prononcer l’Oraison funèbre du prince de Condé, nous déclarons que le style en est déclamatoire. Cependant ce n’est pas une raison, parce que l’on est plat, de qualifier l’éloquence du nom de déclamation. Comme nous avons eu rarement l’occasion d’hésiter entre l’empire du monde et notre amour pour une reine, nous décidons que le style de Bérénice est précieux. Cependant ce n’est pas une raison, parce que l’on est grossier, de qualifier la délicatesse du nom de préciosité. Le vrai, c’est que toutes manières de s’exprimer sont bonnes quand elles sont en leur place. On peut ajouter que c’est un secret que nous avons perdu.

Poussons maintenant un peu plus avant, et après l’apologie de la métaphore et de la périphrase, esquissons, en étendant seulement un peu le sens des mots, l’éloge de la banalité.

Je trouve un étrange exemple dans ce Dictionnaire des lieux communs. Le voici. Quand un président d’assises prononce les paroles sacramentelles : « Accusé, levez-vous, » il paraît que ce président donne dans le lieu commun. Et M. Jourdain, aussi lui, sans doute, à ce compte, lorsqu’il dit : « Nicole, apporte-