Page:Brunetière - Honoré de Balzac, 1906.djvu/142

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sciente, mais non pas pour cela tout à fait ni précisément involontaire. « Je me suis senti poussé par une force intérieure, à laquelle je n’ai pu résister. — Examinons un peu cela, et voyons si la direction que vous avez donnée à votre vie n’aurait pas eu pour objet de rendre cette force irrésistible ». Si c’est bien ainsi que se pose aujourd’hui la question du déterminisme historique, ne devons-nous pas rappeler que c’est bien ainsi qu’elle se pose déjà dans les romans de Balzac ? Et s’il serait aisé de montrer, comme nous le montrerons, que c’est bien à lui, Balzac, et non à un autre, philosophe ou historien, que toute une moderne école a emprunté cette conception de l’histoire, n’est-ce pas une preuve encore, s’il en fallait donner une dernière, de la profondeur de son sens historique ?

Mais la valeur historique d’un roman tel que la Cousine Bette ou César Birotteau n’en constitue pas tout le mérite, et sur tant d’autres romans, — mettons Mauprat ou Marianna, — s’ils n’avaient que cette supériorité, seraient-ils les romans qu’ils sont ? Je le crois, pour ma part, et je viens d’essayer d’en dire les raisons.