Page:Brunetière - Honoré de Balzac, 1906.djvu/201

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jusqu’à Balzac, non seulement sur les moyens de porter le roman à la perfection de son genre, mais sur l’objet même du roman ? Cela se pourrait, et n’aurait rien de très extraordinaire : les poètes et les critiques, en France, ne se sont-ils pas mépris, pendant plus de deux siècles, sur les conditions du lyrisme ? Mais ici c’est autre chose, et la vérité, c’est que pendant longtemps « la représentation de la vie » n’a pas été considérée comme un objet digne de l’art. Ce qui a été en question durant tout l’âge classique, ce ne sont pas les moyens d’acheminer le roman vers sa perfection, c’est, au fond, le roman comme genre littéraire. Et aussi, c’est pourquoi, durant tout l’âge classique, pas plus en Italie qu’en Angleterre ou en Espagne qu’en France, aucun grand écrivain, — à l’exception du seul Cervantes, et don Quichotte est-il un roman ? — ne s’est exercé dans le roman. Des romanciers ont pu se rencontrer, qui furent de remarquables écrivains, Daniel de Foe, par exemple, en Angleterre ou, chez nous, Alain René Le Sage, mais ce n’est ni à son Gil Blas que Le Sage, ni à son Robinson que de Foe ont appliqué leur