de Cléveland et du Doyen de Killerine, qu’on lisait beaucoup, ne passait dans l’histoire de la littérature que pour un besogneux ouvrier de lettres. On n’avait point découvert les Liaisons dangereuses. Si l’on faisait une exception pour l’auteur de la Nouvelle Héloïse, c’est qu’il était Rousseau, l’auteur du reste de son œuvre, et de cette Héloïse, on ne retenait guère, pour les discuter, que les dissertations d’un caractère moral, politique ou social. Symptôme caractéristique et témoignage éloquent de la mince estime où l’on tenait le roman : aucun romancier, comme tel, à titre unique de romancier, ne faisait, ni, depuis 1635, n’avait fait partie de l’Académie française ! Jules Sandeau sera le premier ; et si je ne me trompe, Octave Feuillet — en 1862 seulement, — le second. C’est assez dire quel élan le roman attendait de l’homme qui serait capable de le lui donner, — comme notre comédie française avant Molière, ou le drame anglais avant Shakespeare ; — et quelle carrière s’ouvrait devant cet homme. Essayons de voir en quelles circonstances, et à quelles conditions, Balzac l’est devenu.
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