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Page:Brunetière - L’Évolution de la poésie lyrique en France au dix-neuvième siècle, t2, 1906.djvu/174

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L’ÉVOLUTION DE LA POÉSIE LYRIQUE

d’une « nation » tout entière, d’une époque historique, d’une a furme religieuse on intellectuelle » qu’il s’est proposé d’incarner ; et si ce n’est pas l’alliance encore de la science et de la poésie, c’est au moins déjà, vous le voyez, celle de la poésie et de l’érudition. Pour retrouver et réunir, selon sa propre expression[1], « les titres de famille de l’intelligence humaine ! » le poète s’est doublé d’un orientaliste, d’un archéologue et d’un historien. Lisons ensemble la Vérandah.

Au tintement de l’eau dans les porphyres roux,
Les rosiers de l’Iran mêlent leurs frais murmures,
Et les ramiers rêveurs leurs roucoulements doux.
Tandis que l’oiseau grêle et le frelon jaloux.
Sifflant et bourdonnant, mordent les ligues mûres,
Les rosiers de l’Iran mêlent leurs frais murmures
Au tintement de l’eau dans les porphyres roux.

Sous les treillis d’argent de la vérandah close,
Dans l’air tiède, embaumé de l’odeur des jasmins,
Où la splendeur du jour darde une flèche rose,
La Persane royale, immobile, repose,
Derrière son col brun croisant ses belles mains.
Dans l’air tiède, embaumé de l’odeur des jasmins.
Sous les treillis d’argent de la vérandah close.
..........................
Deux rayons noirs, chargés d’une muette ivresse,
Sortent de ses longs yeux entr’ouverts à demi ;
Un songe l’enveloppe, un souffle la caresse ;
Et parce que l’effluve invisible l’oppresse.
Parce que son beau sein qui se gonfle a frémi,
Sortent de ses longs yeux entr’ouverts à demi
Deux rayons noirs, chargés d’une muette ivresse.

  1. Voyez dans les premières éditions, Paris, 1852, Ducloux, la préface des Poèmes antiques.