ciles, depuis quelques années, n’a-t-on pas, ici taillés
en pierre, et là, coulés en bronze ! Quel mal cela
fait-il ? Du haut d’une fontaine, sur la place publique
du chef-lieu de son arrondissement, si cet ancien
ministre ne présidait pas aux commérages des ménagères,
en seraient-elles par hasard moins bavardes,
ou l’eau de la fontaine plus limpide ? Mais du fond
d’un massif de verdure, si ce bohème de lettres ne
mêlait pas sa face de marbre aux entretiens du militaire
avec la nourrice, la verdure en serait-elle plus
fraîche ou la nourrice moins tendre ? Puisque rien ne
change rien à rien, qu’on laisse donc aller les choses.
Le vrai feu d’artifice est d’être magnanime…
Pareillement, la « vraie statue » est d’avoir inscrit son nom avec son œuvre dans l’histoire de la littérature ou de l’art. La cérémonie banale de l’inauguration d’un buste, qui n’enlèvera pas sans doute un lecteur aux Fleurs du mal, ne leur en attirera pas non plus qui n’en fissent depuis longtemps leurs délices. Après comme avant la statue, Baudelaire sera tout ce qu’il était. Ou plutôt, avec le goût que les hommes, en général, ont pour la contradiction, qui répondra que ce n’est pas nous, en l’attaquant, dont la maladresse lui suscitera des sympathies inattendues ? On voudra voir ; on le trouvera moins « noir » que nous ne le représentons ; et si trente-cinq années écoulées sont peut-être un long espace de temps, tout ce que