Ah ! si les Dieux jaloux, vierge, n’ont pas formé
La neige de ton corps d’un marbre inanimé
Viens au fond du grand bois, sous les larges ramures
Pleines de frais silence et d’amoureux murmures.
L’oiseau rit dans les bois, au bord des nids mousseux,
Ô belle chasseresse ! et le vent paresseux
Berce du mol effort de son aile éthérée
Les larmes de la nuit sur la feuille dorée.
Et en voici d’un autre genre, moins idyllique et moins gracieux, que j’emprunte à la pièce d’Héraklès au Taureau :
Or, dardant ses yeux prompts sur la peau léonine
Dont Héraklès couvrait son épaule divine,
Irritable, il voulut heurter d’un brusque choc,
Contre cet étranger son front dur comme un roc,
Mais, ferme sur ses pieds, tel qu’une antique borne.
Le héros d’une main le saisit par la corne,
Et sans rompre d’un pas, il lui ploya le col.
Meurtrissant ses naseaux furieux dans le sol.
Et les bergers en foule, autour du fils d’Alcmène,
Stupéfaits, admiraient sa vigueur surhumaine,
Tandis que, blancs dompteurs de ce soudain péril
De grands muscles roidis gonflaient son bras viril
Ut pictura poesis ! si jamais on a peint en vers, ou
pour mieux dire, si jamais on a « sculpté », c’est dans
des vers comme ceux-ci ; et, naturellement, je ne les
ai pas choisis sans quelque intention de montrer
comment le souci de la forme se lie au respect de
l’antiquité. Le bon Gautier, qui n’était pas un grand
clerc, ni surtout un « grand Grec », en avait bien
soupçonné quelque chose. Mais il aimait trop l’Espagne : et puis, comment se fût-il dégagé de ses origines romantiques ? Les Poèmes antiques firent ce que