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Page:Brunetière - Questions de critique, 1897.djvu/27

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SUR UN BUSTE DE RABELAIS

programmes d’éducation, dont je défie bien qu’on démêle autrement la confusion très réelle. Il n’y a qu’une règle en sa clause ou qu’une clause en sa règle, aisée à retenir, facile à pratiquer : Fais ce que voudras ; « parce que, — comme il le dit. — gens libères, bien nés, bien instruits, conversants en compagnies honnêtes, ont par nature un instinct et aiguillon qui toujours les pousse à fait vertueux et les retire de vice ». En d’autres termes, Nature est à ses yeux institutrice de vertu ; et tout le secret de l’éducation ne consiste pour lui qu’à favoriser l’expansion des instincts. Le vice ou le mal, selon Rabelais, c’est de s’écarter de la nature, le bien ou la vertu, c’est de s’en rapprocher. Ne rien étouffer, comprimer, gêner ou corriger, mais tout aider, encourager, favoriser, développer, voilà donc son système, ou, pour mieux dire, son idéal, car il n’a point de système, à le bien prendre, mais plutôt ce qu’on appelle des vues. Pendant près de mille ans, Antiphysis a gouverné le monde, mais maintenant Physis triomphe ou va triompher d’elle, et la vie, rendue à son objet, qui n’est autre que la vie même, que le plaisir et la joie de vivre, va s’épanouir dans l’orgueil de sa force etdc sa liberté. Plus de « lois, de statuts ni de règles », plus de contrainte ni d’autorité qui resserre, ou qui émonde, ou qui ébranche, plus d’efforts sur ou contre soi-même, mais le développement plein et harmonieux de toutes les facultés, de toutes les puissances de l’être, l’enfant ou le jeune homme institué par