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Page:Buffault - Étude sur la côte et les dunes du Médoc.djvu/43

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des Méduliens le flot de la marée engraisse, je les ai reçues, cher Théon ; c’est un magnifique présent. » (Épître vii).

De ces textes il ressort que l'extrémité de la presqu’île médulienne, déjà appelée fin des terres (extremis telluris in oris) était un terrain sablonneux, mais néanmoins cultivé, et que les dunes n'existaient pas encore. C’était en somme le sol des landes tel qu’il est de nos jours se continuant sans obstacle jusqu’à l’océan. Strabon a d’ailleurs écrit : « Aquitaniæ solum, quod est ad latus oceani, majore sui parte arenosum et tenue… » Le saltus Vasconiæ s’étendait jusque dans cette extrémité de la presqu’île et donnait abri à des cerfs et à des sangliers qu’on y chassait. Bans les marais d’eau saumâtre de l’estuaire girondin on élevait des huîtres exquises aujourd’hui disparues. Sur la côte on pêchait le turbot (carroco), la pastenague (trygon), les molles platusses ou soles (platessæ), le thon (thynni), la gate ou élacat (elegati), le perlon ou sciène (corni), etc.

L’étymologie de Domnoton, résidence de Théon, serait fournie par les mots celtiques : dom, habitation et not, port, habitation près d’un port ou dans un port. Baurein réfute sans peine l’opinion de ceux qui placent Domnoton à Donissan. Le seul port vraiment commerçant du pays devait être alors Noviomagus et Domnoton en était un faubourg, une annexe, ou s’en trouvait tout proche. Ou bien, si Noviomagus avait déjà disparu, Domnoton était alors port lui-même et c’est dans cette bourgade que se faisait le négoce sur les suifs, les cires, les poix, le papyrus, dont parle Ausone, En tout cas Domnoton était bien à l’extrémité du Bas-Médoc, peut-être à la place occupée aujourd’hui par Soulac. Le port de Condat, où une seule marée vous amenait de Domnoton, se trouvait dans une baie devenue aujourd’hui les marais de Vertheuil, non loin de la villa Pauliaca (Pauillac) où Ausone venait en villégiature.

Notons que les suifs, les cires, les bois résineux (tædas) devaient être des productions locales, que par suite les Médocains élevaient les animaux et possédaient les forêts aptes à les produire ; que dans ces forêts on gemmait les pins et on distillait la résine. Le papyrus était par contre évidemment marchandise d’importation égyptienne et la poix de Nérycie (pays de la Grande Grèce, Italie méridionale, province du Bruttium), d’importation italienne, ce qui est une preuve de plus des antiques relations de la Gascogne avec l’Orient et les régions méditerranéennes.

Nous ne croyons pas que la forme interrogative des phrases d’Ausone dans sa 5e épître, permette d’affirmer, comme l’ont fait généralement les commentateurs modernes, que Théon exerçait des fonctions de prévôt et de chef de police et était en même temps commerçant, chasseur, pêcheur, etc. On est seulement en droit de conclure que ces fonctions existaient en Médoc, ainsi que les objets de commerce et les animaux cités par le poète.

D’après le texte, il s’y trouvait aussi dès cette époque de ces vaga-