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1683 ; il mourut le 23 avril 1775, c’est-à-dire treize ans seulement avant son fils, aux triomphes duquel il put applaudir. Il exerça d’abord l’office de conseiller du roi, président au grenier à sel de Montbard, puis la charge de commissaire général des maréchaussées de France. Le 14 juin 1740, il fut pourvu de l’office de conseiller au Parlement de Bourgogne. Il résigna cette charge le 13 novembre 1742, et obtint, le 12 mai, ses lettres d’honneur.

Leclerc était seigneur de Buffon et de Mairie. Il y jouissait des droits de haute, basse et moyenne justice.

La mère de Buffon, Christine Marlin, a laissé le souvenir d’une femme de cœur et de grande intelligence. Le fils eut, paraît-il, beaucoup du caractère de sa mère. L’un de ses biographes[1] dit à cet égard : « Buffon avait ce principe qu’en général les enfants tenaient de leur mère leurs qualités intellectuelles et morales, et lorsqu’il l’avait développé dans la conversation, il en faisait sur-le-champ l’application à lui-même, en faisant un éloge pompeux de sa mère, qui avait en effet beaucoup d’esprit, des connaissances étendues, une tête très bien organisée, et dont il aimait à parler souvent. »

La seule chose qu’on sait de l’enfance de Buffon, c’est qu’il fut élevé par les jésuites, à Dijon, où son père vint en 1720 après avoir acheté une charge de conseiller au Parlement de Bourgogne. Voltaire, Diderot, vingt autres hommes de lettres et de sciences du xviiie siècle reçurent, comme Buffon, l’instruction et l’éducation dans les maisons de la Compagnie de Jésus, qui se distinguaient à cette époque pour la qualité de leurs méthodes, la valeur scientifique et la distinction des manières de leurs maîtres.

Du temps qu’il passa au collège des godrans, chez les jésuites de Dijon, de la façon dont il fit ses études, on ne sait presque rien. On n’a conservé dans sa famille que le souvenir de son amour des mathématiques, qui étaient alors très en vogue, mais dont le règne ne devait pas tarder à faire place à celui des sciences d’observation[2]. Buffon aimait particulièrement la géométrie ; il portait toujours avec lui les éléments d’Euclide et le Traité analytique des sections coniques, du marquis de l’Hôpital. Il jouait surtout au jeu de paume, qui a toujours été le jeu de prédilection des collèges des jésuites.

  1. Hérault de Séchelles, Voyage à Montbard, p. 24.
  2. En 1754, Diderot écrit : « Nous touchons au moment d’une grande révolution dans les sciences. Au penchant que les esprits me paraissent avoir à la morale, aux belles-lettres, à l’histoire de la nature et à la physique expérimentale, j’oserais presque assurer qu’avant qu’il soit cent ans, on ne comptera pas trois grands géomètres en Europe. Cette science s’arrêtera tout court, où l’auront laissée les Bernouilli, les Euler, les Maupertuis, les Clairaut, les Fontaine, les D’Alembert et les Lagrange. Ils auront posé les colonnes d’Hercule, on n’ira point au delà. Leurs ouvrages subsisteront dans les siècles à venir, comme les pyramides d’Egypte, dont les masses chargées d’hiéroglyphes réveillent en nous une idée effrayante de la puissance et des ressources des hommes qui les ont élevées. (De l’interprétation de la Nature, Éd. Assézat, t. II, p. 11.)