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plus profondément, il se formerait par combinaison des silicates plus complexes, cristallins. On a objecté, à cette manière de voir, le temps énorme qu’elle exige pour produire le métamorphisme des roches. Cependant, en admettant qu’elle ne puisse pas être appliquée à tous les cas, il est indéniable qu’elle suffit pour expliquer un certain nombre d’actions métamorphiques. Il est démontré, par exemple, que les roches contenant de l’augite, du mica, du hornblende, du grenat, de la diallage, etc., c’est-à-dire des silicates de magnésie hydratés, se transforment en serpentine, — qui est un silicate moins altérable par les agents atmosphériques —, sous l’influence de l’eau chargée d’acide carbonique et de sulfate, de carbonate ou de chlorure de magnésie. On sait également que les calcaires magnésiens, c’est-à-dire contenant à la fois de la magnésie et de la chaux, sont facilement transformés, par les eaux chargées d’acide carbonique, en dolomie ou calcaire presque uniquement formé de carbonate de magnésie. Nous avons déjà parlé des nombreux phénomènes chimiques que l’eau chargée d’oxygène et d’acide carbonique est capable de déterminer dans la profondeur du sol, nous n’y reviendrons pas ici.

Il n’est pas douteux que les eaux jouissant d’une température élevée, ou transformées en vapeur par les foyers caloriques de l’intérieur de la terre, jouent un rôle considérable dans les transformations de roches qui se produisent au sein de notre globe. Leur température élevée favorise beaucoup les actions de dissociation et de dissolution dont nous avons parlé plus haut, et leur fait acquérir par suite une puissance de décomposition qu’elles n’ont pas à l’état normal. Des expériences de M. Daubrée ont mis hors de doute l’action puissante que l’eau surchauffée peut exercer et exerce, sans aucun doute, sur les roches avec lesquelles elle se trouve en contact. De l’eau pure, chauffée à 3000° R., transforme des fragments d’obsidienne en trachite cristallin, et des fragments de verre en une masse semblable à du kaolin, formée en majeure partie de cristaux de quartz et d’aiguilles de wollastonite. Des transformations analogues se produisent sous nos yeux dans la nature. Les eaux minérales et chaudes de Plombières, qui sont riches en silicates d’alcalis, ont déposé dans les vieux conduits des bains romains du calcaire spathique, du spath-fluor, de l’aragonite, de l’hyalithe, etc. ; elles ont changé le kaolin en cristaux de feldspath, etc.

Je crois inutile d’insister sur ces phénomènes, dont l’importance est suffisamment indiquée par ce que nous venons d’en dire, et qui devront d’ailleurs attirer, plus tard, de nouveau notre attention, lorsque nous étudierons les phases d’évolution de notre globe.

Action destructive de la mer. Pour achever l’histoire des actions destructives de l’eau, il nous reste, à parler de celle de la mer. Personne n’ignore que les eaux de la mer sont sans cesse en mouvement, qu’elles s’élèvent et s’abaissent alternativement le long des côtes, phénomène qui a reçu les noms de flux et reflux, et qu’il