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les plus élevées qu’elle n’a pu surmonter, ce qui fait encore autant d’îles ; et on remarque, en conséquence, qu’il y a fort peu d’îles dans le milieu des mers, et qu’elles sont presque toutes dans le voisinage des continents où la mer les a formées, soit en s’éloignant, soit en s’approchant de ces différentes contrées. »

Ailleurs[1], il parle de l’action des pluies et des couches qu’elles servent à former : « L’intérieur des montagnes est principalement composé de pierres et de rochers dont les différents lits sont parallèles ; on trouve souvent entre les lits horizontaux de petites couches d’une matière moins dure que la pierre, et les fentes perpendiculaires sont remplies de sable, de cristaux, de minéraux, de métaux, etc. Ces dernières matières sont d’une formation plus nouvelle que celle des lits horizontaux, dans lesquels on trouve des coquilles marines. Les pluies ont peu à peu détaché les sables et les terres du dessus des montagnes, et elles ont laissé à découvert les pierres et les autres matières solides, dans lesquelles on distingue aisément les couches horizontales et les fentes perpendiculaires ; dans les plaines, au contraire, les eaux des pluies et les fleuves ayant amené une quantité considérable de sable, de terre, de gravier et d’autres matières divisées, il s’en est formé des couches de tuf, pierre molle et fondante, de sable et de gravier arrondi, de terre mêlée de végétaux ; ces couches ne contiennent point de coquilles marines, ou du moins n’en contiennent que des fragments, qui ont été détachés des montagnes avec les graviers et les terres : il faut distinguer avec soin ces nouvelles couches des anciennes, où l’on trouve presque toujours un grand nombre de coquilles entières et posées dans leur situation naturelle. »

Plus loin encore[2], il insiste sur le rôle des pluies dans la formation des couches les plus superficielles du sol : « Nous avons dit que les pluies, et les eaux courantes qu’elles produisent, détachent continuellement du sommet et de la croupe des montagnes les sables, les terres, les graviers, etc., et qu’elles les entraînent dans les plaines, d’où les rivières et les fleuves en charrient une partie dans les plaines plus basses, et souvent jusqu’à la mer ; les plaines se remplissent donc successivement et s’élèvent peu à peu, et les montagnes diminuent tous les jours et s’abaissent continuellement, et dans plusieurs endroits on s’est aperçu de cet abaissement. Joseph Blancanus rapporte sur cela des faits qui étaient de notoriété publique dans son temps, et qui prouvent que les montagnes s’étaient abaissées au point que l’on voyait des villages et des châteaux de plusieurs endroits d’où on ne pouvait pas les voir autrefois. Dans la province de Darby, en Angleterre, le clocher du village Craih n’était pas visible en 1572 depuis une certaine montagne, à cause de la hauteur d’une autre montagne interposée, laquelle s’étend en Hopton et Wirksworth, et quatre-vingts ou cent ans après, on voyait ce clocher

  1. Des îles nouvelles, des cavernes, etc., t. Ier, p. 225.
  2. De l’effet des pluies, des marécages, etc., t. Ier, p. 231.