Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome I, partie 1.pdf/223

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parce que toutes les hauteurs de la terre sont ordinairement composées de pierres et de rochers, surtout vers le sommet. Il faut, pour trouver de l’eau, creuser dans la pierre et dans le rocher jusqu’à ce qu’on parvienne à la base, c’est-à-dire à la glaise ou à la terre ferme sur laquelle portent ces rochers, et on ne trouve point d’eau tant que l’épaisseur de la pierre n’est pas percée jusqu’au-dessous, comme je l’ai observé dans plusieurs puits creusés dans les lieux élevés ; et lorsque la hauteur des rochers, c’est-à-dire l’épaisseur de la pierre qu’il faut percer est fort considérable, comme dans les hautes montagnes, où les rochers ont souvent plus de 1 000 pieds d’élévation, il est impossible d’y faire des puits, et par conséquent d’avoir de l’eau. Il y a même de grandes étendues de terre où l’eau manque absolument, comme dans l’Arabie Pétrée, qui est un désert où il ne pleut jamais, où des sables brûlants couvrent toute la surface de la terre, où il n’y a presque point de terre, végétale, où le peu de plantes qui s’y trouvent languissent ; les sources et les puits y sont si rares, que l’on n’en compte que cinq depuis le Caire jusqu’au mont Sinaï, encore l’eau est-elle amère et saumâtre. »

L’action réparatrice de la mer ne lui paraît pas moins importante que celle des fleuves et des pluies. « Il est vraisemblable, dit-il[1], que la mer peut former de nouveaux terrains en y apportant les sables, la terre, la vase, etc. » Et il cite un grand nombre de faits qui confirment cette assertion.

Plus loin, il dit encore : « La mer peut former des collines et élever des montagnes de plusieurs façons différentes, d’abord par des transports de terre, de vase, de coquilles d’un lieu à un autre, soit par son mouvement naturel de flux et de reflux, soit par l’agitation des eaux causée par les vents ; en second lieu par des sédiments des parties impalpables qu’elle aura détachées des côtes et de son fond, et qu’elle pourra transporter et déposer à des distances considérables, et enfin par des sables, des coquilles, de la vase et des terres que les vents de mer poussent souvent contre les côtes, ce qui produit des dunes et des collines que les eaux abandonnent peu à peu, et qui deviennent des parties du continent. Nous en avons un exemple dans nos dunes de Flandre et dans celles de Hollande, qui ne sont que des collines composées de sable et de coquilles que les vents de mer ont poussées vers la terre. »

Puis, il résume de la façon suivante son opinion sur l’action exercée par l’eau dans les modifications subies par la surface de notre globe[2] : « Les mouvements de la mer sont donc les principales causes des changements qui sont arrivés et qui arrivent sur la surface du globe ; mais cette cause n’est pas unique ; il y en a beaucoup d’autres moins considérables qui contribuent à ces changements les eaux courantes, les fleuves, les ruisseaux, la fonte des neiges, les torrents, les gelées, etc., ont changé considérable-

  1. Des changements de terres en mers et de mers en terres, t. Ier, p. 238.
  2. Ibid., t. Ier, p. 243.