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même que l’ooze à globigérines, la vase siliceuse et le sable vert seraient des produils indirects de l’action de la vie.

» Les agents métamorphiques, agissant ensuite sur l’argile, peuvent la transformer en schiste, et tous les minéraux fondamentaux qui entrent dans la composition des roches peuvent ainsi avoir été produits par des organismes vivants, quoiqu’on ne puisse, dans leur état ultime, y découvrir aucune trace de ces derniers. »

Îles de coraux.
Leur formation.
Pour terminer l’histoire si intéressante des formations calcaires, je dois dire quelques mots des îles de coraux, au sujet desquelles Darwin a fait de si curieuses observations. Le corail rouge et les coraux blancs, qui seuls nous intéressent ici, sont les squelettes d’animaux appartenant au groupe des cœlentérés qui vivent sur le fond des mers chaudes. Dans la Méditerranée, on pêche une grande quantité de corail rouge, mais les coraux blancs ne se trouvent guère que dans les mers intertropicales et même pas dans toutes. L’océan Pacifique est de toutes les grandes mers, celle qui en contient le plus ; certains groupes d’îles de la mer Pacifique, entièrement formées, du moins à la surface, de squelettes de coraux, ont près de 2 000 kilomètres de long. Citons : la chaîne des récifs et des îles connue sous le nom de Maldives, au sud-ouest du Malabar, qui a une largeur moyenne de 8 kilomètres, et une longueur de 470 milles géographiques ; au nord-ouest de l’Australie, il existe une rangée de récifs longue de plus de 1 600 kilomètres et large de 32 à 112 kilomètres ; sur la côte orientale de la Nouvelle-Hollande, on a signalé un récif de coraux, long de près de 600 kilomètres, ininterrompu sur une étendue de 560 kilomètres. Il existe encore un grand nombre de coraux dans la mer des Antilles, dans le golfe Persique et dans le golfe Arabique. On ne trouve que rarement des coraux au delà du 32e degré de latitude nord ou sud ; cependant, les îles Bermudes et quelques autres points baignés par le Gulf-Stream en présentent une assez grande quantité. Ajoutons ce fait important découvert par Darwin que, quoiqu’on ait trouvé des coraux à des profondeurs de plus de 100 mètres, il est rare qu’ils vivent à plus de 36 mètres au-dessous de la surface. Nous verrons que c’est ce fait qui a mis sur la voie de la découverte de la façon dont se développent les îles de coraux.

Ces îles affectent une forme à peu près constante. Elles se présentent presque toujours sous l’aspect d’un plateau peu élevé au-dessus de la mer, à bords abrupts, souvent couverts de végétation, et limitant une lagune circulaire qui occupe presque toute la surface de l’île. Dans un point de la côte annulaire qui entoure la lagune centrale, il existe presque toujours une sorte de canal très profond, faisant communiquer la lagune avec la haute mer. Au pied des rivages de l’île, la mer a toujours une profondeur très considérable : 100, 150, 200 brasses et même davantage. Jusqu’à une profondeur de 30 à 36 mètres au-dessous du niveau des marées, le rivage abrupt de ces îles est tapissé de coraux vivants ; au niveau des marées, la plage et les