Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome I, partie 1.pdf/260

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

globe où un grand nombre de terrains distincts étaient régulièrement superposées, on put logiquement en faire l’application aux régions dans lesquelles règne un ordre moins parfait dans la disposition des couches terrestres, ou qui présentent des lacunes plus ou moins considérables. On put ainsi établir la parenté de terrains offrant des caractères pétrographiques plus ou moins distincts. On cite volontiers, dans les ouvrages classiques, comme exemple d’application de ce principe à la détermination des terrains, l’usage qui en est fait pour le crétacé. Il n’y a pas de formation aussi variable pétrographiquement que celle du crétacé ; à Meudon, à Calais, à Douvres, etc., il est représenté par une craie blanche contenant des noyaux de silex ; dans la Suisse saxonne il est représenté par des grès ; dans le Hanovre et le Brunswick, ce sont des argiles plastiques et une craie marneuse ; en Belgique et à l’est de l’Amérique du Nord, ce sont des marnes glauconieuses ; dans l’ouest de la Californie, ce sont des schistes cristallins, etc. Pourquoi, malgré ces différences considérables de composition minérale, a-t-on réuni toutes ces couches sous la dénomination de crétacé ? Parce qu’elles offrent des rapports identiques de position avec les terrains susjacents et sous-jacents, et surtout parce que, dans ces diverses localités, elles renferment des espèces animales et végétales semblables ou très voisines. Il ne faut pas oublier cependant que, d’après ce que nous avons dit plus haut, les espèces animales pourraient être assez distinctes sans que cependant on fût en droit de conclure à la non-identité des terrains ; il suffirait pour cela qu’il eût existé des différences dans le climat ou les autres conditions de milieu entre les diverses régions indiquées. D’où il faut conclure que si les fossiles fournissent un élément précieux de détermination de l’âge relatif des formations géologiques, ils peuvent aussi conduire à des erreurs plus ou moins graves. Il arrive fréquemment, par exemple, que des couches manifestement du même âge, d’après les rapports de stratification, soient riches les unes en certaines espèces de fossiles, les autres en des espèces différentes ; ou bien que les unes aient des fossiles, tandis que les autres en sont dépourvues. Ce dernier fait peut se présenter même avec des couches formées exactement de la même façon, mais dont les unes sont restées intactes, tandis que les autres ont subi des actions métamorphiques.

Époques de l’évolution de la terre. Je crois en avoir dit assez pour donner au lecteur une idée des progrès faits dans cette voie par la géologie depuis l’époque de Buffon. Je terminerai cette partie de mon étude par l’indication des époques principales entre lesquelles on peut actuellement distribuer l’histoire de la terre. Il suffira de comparer ce que j’en vais dire avec les époques de Buffon, signalées précédemment, pour saisir d’un premier coup d’œil les ressemblances et les différences qui existent entre les deux divisions.

Première époque. La première époque est caractérisée par l’état d’incandescence de la terre. Elle s’étend depuis l’heure où la terre s’est séparée de la nébuleuse