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solaire, jusqu’à celle où sa surface s’est refroidie. Ce que nous en avons dit déjà nous dispense d’en reparler en ce moment. Bornons-nous à rappeler que tout ce que l’on en raconte est purement hypothétique et ne peut être admis que par comparaison avec ce que nous pouvons actuellement observer dans les autres parties de l’univers.

Deuxième époque. La deuxième époque correspond à la période pendant laquelle la terre, étant suffisamment consolidée et refroidie, la vapeur d’eau se précipita à sa surface pour former les mers, se séparant des gaz oxygène, azote et acide carbonique qui désormais formèrent seuls l’atmosphère de notre globe. Nous devons dire quelques mots de cette époque, parce qu’elle a été l’objet de considérations intéressantes de la part de Buffon et de ses successeurs. On s’assurera par là que les idées de Buffon n’ont guère été modifiées par la science moderne. « Représentons-nous, dit-il[1], l’aspect qu’offrait la terre immédiatement après que sa surface eut pris de la consistance et avant que la grande chaleur permît à l’eau d’y séjourner ni même de tomber de l’atmosphère ; les plaines, les montagnes, ainsi que l’intérieur du globe, étaient également et uniquement composées de matières fondues par le feu, toutes vitrifiées, toutes de la même nature. Qu’on se figure pour un instant la surface actuelle du globe dépouillée de toutes ses mers, de toutes ses collines calcaires, ainsi que de toutes ses couches horizontales de pierre, de craie, de tuf, de terre végétale, d’argile, en un mot de toutes les matières liquides ou solides qui ont été formées ou déposées par les eaux : quelle serait cette surface après l’enlèvement de ces immenses déblais ? Il ne resterait que le squelette de la terre, c’est-à-dire la roche vitrescible qui en constitue la masse intérieure ; il resterait les fentes perpendiculaires produites dans le temps de la consolidation, augmentées, élargies par le refroidissement ; il resterait les métaux et les minéraux fixes qui, séparés de la roche vitrescible par l’action du feu, ont rempli par fusion ou par sublimation les fentes perpendiculaires de ces prolongements de la roche intérieure du globe ; et enfin il resterait les trous, les anfractuosités et toutes les cavités intérieures de cette roche qui en est la base, et qui sert de soutien à toutes les matières terrestres amenées ensuite par les eaux. »

Plus loin[2], il décrit avec une merveilleuse éloquence les phénomènes qu’il suppose s’être produits, alors que la terre fut suffisamment refroidie, pour que la vapeur d’eau se précipitât à sa surface. « Le chaos de l’atmosphère avait commencé à se débrouiller : non seulement les eaux, mais toutes les matières volatiles que la trop grande chaleur y tenait reléguées et suspendues tombèrent successivement ; elles remplirent toutes les profondeurs, couvrirent toutes les plaines, tous les intervalles qui se trouvaient

  1. Époques de la nature, t. II, p. 42.
  2. Ibid., t. II, p. 50.