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tion des animaux et des végétaux. Si le bourgeon d’un saule ou d’un polype est capable de produire un saule ou un polype semblable à celui qui lui a donné naissance, cela est dû à ce que les cellules de ce bourgeon, ont été formées par des gemmules provenant de toutes les cellules du saule ou du polype primitif. Si l’œuf d’une poule peut produire un poulet semblable à la poule qui a pondu l’œuf et au coq qui l’a fécondé, cela tient à ce que l’œuf est formé de gemmules fournies par toutes les cellules de la poule et à ce que le spermatozoïde fécondateur qui s’est fondu avec l’œuf est constitué par des gemmules provenant de toutes les cellules du coq. Si le petit-fils d’un homme est capable de présenter des caractères que n’avait pas son père, mais que possédait son grand-père, cela tient à ce que pendant une génération entière les gemmules du grand-père sont restées à l’état latent. Enfin, si toutes les sortes de cellules, épidermiques, osseuses, nerveuses, musculaires, sanguines, etc., d’un homme, se retrouvent dans son fils et dans toutes les générations successives des hommes, cela tient à ce que chacune de ces cellules produit des gemmules qui donnent naissance à des cellules semblables. « Les physiologistes, dit Darwin[1], admettent ordinairement que les unités du corps sont autonomes ; je fais un pas de plus et j’admets qu’elles émettent des gemmules reproductrices. En conséquence, un organisme n’engendre pas son semblable comme un tout, mais chaque unité séparée engendre une unité semblable. Les naturalistes ont souvent affirmé que chaque cellule d’une plante possède la capacité potentielle de produire la plante entière ; or, cette cellule ne possède cette propriété que parce qu’elle contient des gemmules provenant de chaque partie de la plante. Quand une cellule ou unité se trouve modifiée en vertu d’une cause quelconque, les cellules qui en proviennent sont modifiées de la même manière. Si on accepte provisoirement notre hypothèse, on doit admettre que toutes les formes de la reproduction asexuelle sont fondamentalement les mêmes, soit que la reproduction se fasse pendant la maturité de l’individu ou pendant sa jeunesse, et dépend de l’agrégation mutuelle et de la multiplication des gemmules. La régénération d’un membre amputé et la cicatrisation d’une blessure constituent un phénomène analogue à la reproduction asexuelle, mais se produisant seulement sur une partie du corps. Les bourgeons semblent contenir des cellules naissantes appartenant à la phase du développement existant au moment où le bourgeon se produit, et ces cellules sont prêtes à s’unir avec les gemmules provenant des cellules qui leur succèdent immédiatement dans la série. Les éléments sexuels, au contraire, ne contiennent pas des cellules naissantes analogues ; l’élément mâle et l’élément femelle pris séparément ne contiennent pas un nombre suffisant de gemmules pour amener un développement indépendant, sauf toutefois dans le cas de parthénogenèse. Le développement

  1. De la variation des animaux et des plantes à l’état domestique, t. II, p. 423.