Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome I, partie 2.pdf/62

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la situation des matières qui composent cette première épaisseur du globe terrestre, la seule que nous connaissions. Les carrières sont composées de différents lits ou couches presque toutes horizontales ou inclinées suivant la même pente ; celles qui posent sur des glaises ou des bases d’autres matières solides sont sensiblement de niveau, surtout dans les plaines. Les carrières où l’on trouve les cailloux et les grès dispersés ont à la vérité une position moins régulière, cependant l’uniformité de la nature ne laisse pas de s’y reconnaître ; car la position horizontale ou toujours également penchante des couches se trouve dans les carrières de roc vif et dans celles des grès en grande masse ; elle n’est altérée et interrompue que dans les carrières de cailloux et de grès en petite masse, dont nous ferons voir que la formation est postérieure à celle de toutes les autres matières ; car le roc vif, le sable vitrifiable, les argiles, les marbres, les pierres calcinables, les craies, les marnes, sont toutes disposées par couches parallèles horizontales ou également inclinées. On reconnaît aisément dans ces dernières matières la première formation, car les couches sont exactement horizontales et fort minces, et elles sont arrangées les unes sur les autres comme les feuillets d’un livre ; les couches de sable, d’argile molle, de glaise dure, de craie, de coquilles, sont aussi toutes horizontales ou inclinées suivant la même pente : les épaisseurs des couches sont toujours les mêmes dans toute leur étendue, qui souvent occupe un espace de plusieurs lieues, et que l’on pourrait suivre bien plus loin si l’on observait plus exactement. Enfin toutes les matières qui composent la première épaisseur du globe sont disposées de cette façon, et, quelque part qu’on fouille, on trouvera des couches, et on se convaincra par ses yeux de la vérité de ce qui vient d’être dit.

Il faut excepter à certains égards les couches de sable ou de gravier entraîné du sommet des montagnes par la pente des eaux ; ces veines de sable se trouvent quelquefois dans les plaines où elles s’étendent même assez considérablement ; elles sont ordinairement posées sous la première couche de terre labourable, et dans les lieux plats elles sont de niveau comme les couches plus anciennes et plus intérieures ; mais, au pied et sur la croupe des montagnes, ces couches de sable sont fort inclinées, et elles suivent le penchant de la hauteur sur laquelle elles ont coulé : les rivières et les ruisseaux ont formé ces couches, et, en changeant souvent de lit dans les plaines, ils ont entraîné et déposé partout ces sables et ces graviers. Un petit ruisseau coulant des hauteurs voisines suffit, avec le temps, pour étendre une couche de sable et de gravier sur toute la superficie d’un vallon, quelque spacieux qu’il soit, et j’ai souvent observé dans une campagne environnée de collines, dont la base est de glaise aussi bien que la première couche de la plaine, qu’au-dessus d’un ruisseau qui y coule, la glaise se trouve immédiatement sous la terre labourable, et qu’au-dessous du ruisseau il y a une épaisseur d’environ un pied de sable sur la glaise, qui s’étend à une