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filons des particules minérales qu’elle a charriées et déposées sous différentes formes, et toujours au-dessous des filons primitifs[1].

Ainsi la production de ces mines secondaires étant bien plus récente que celle des mines primordiales, et supposant le concours et l’intermède de l’eau, leur formation doit, comme celle des matières calcaires, se rapporter à des époques subséquentes, c’est-à-dire au temps où la chaleur brûlante s’étant attiédie, la température de la surface de la terre a permis aux eaux de s’établir, et ensuite au temps où ces mêmes eaux ayant laissé nos continents à découvert, les vapeurs ont commencé à se condenser contre les montagnes pour y produire des sources d’eau courante. Mais, avant ce second et ce troisième temps, il y a eu d’autres grands effets que nous devons indiquer.

Représentons-nous, s’il est possible, l’aspect qu’offrait la terre à cette seconde époque, c’est-à-dire immédiatement après que sa surface eut pris de la consistance, et avant que la grande chaleur permit à l’eau d’y séjourner ni même de tomber de l’atmosphère ; les plaines, les montagnes, ainsi que l’intérieur du globe, étaient également et uniquement composées de matières fondues par le feu, toutes vitrifiées, toutes de la même nature. Qu’on se figure pour un instant la surface actuelle du globe dépouillée de toutes ses mers, de toutes ses collines calcaires, ainsi que de toutes ses couches horizontales de pierre, de craie, de tuf, de terre végétale, d’argile, en un mot toutes les matières liquides ou solides qui ont été formées ou déposées par les eaux : quelle serait cette surface après l’enlèvement de ces immenses déblais ? Il ne resterait que le squelette de la terre, c’est-à-dire la roche vitrescible qui en constitue la masse intérieure ; il resterait les fentes perpendiculaires produites dans le temps de la consolidation, augmentées, élargies par le refroidissement ; il resterait les métaux et les minéraux fixes qui, séparés de la roche vitrescible par l’action du feu, ont rempli par fusion ou par sublimation les fentes perpendiculaires de ces prolongements de la roche intérieure du globe ; et enfin il resterait les trous, les anfractuosités et toutes les cavités intérieures de cette roche qui en est la base, et qui sert de soutien à toutes les matières terrestres amenées ensuite par les eaux.

Et comme ces fentes occasionnées par le refroidissement coupent et tranchent le plan vertical des montagnes non seulement de haut en bas, mais de devant en arrière, ou d’un côté à l’autre, et que dans chaque montagne elles ont suivi la direction générale de sa première forme, il en a résulté que les mines, surtout celles des métaux précieux, doivent se chercher à la boussole, en suivant toujours la direction qu’indique la découverte du premier filon. Car, dans chaque montagne, les fentes perpendiculaires qui la traversent sont à peu près parallèles ; néanmoins il n’en faut pas conclure,

  1. Voyez ci-après les notes justificatives des faits.