Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 2.djvu/115

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étamines, qui sont les parties les plus substantielles de la plante, et qui contiennent les molécules organiques nécessaires à la reproduction. Je songeai donc sérieusement à examiner au microscope les liqueurs séminales des mâles et des femelles, et les germes des plantes, et je fis sur cela un plan d’expériences : je pensai en même temps que le réservoir de la semence des femelles pouvait bien être la cavité du corps glanduleux dans laquelle Valisnieri et les autres avaient inutilement cherché l’œuf. Après avoir réfléchi sur ces idées pendant plus d’un an, il me parut qu’elles étaient assez fondées pour mériter d’être suivies ; enfin je me déterminai à entreprendre une suite d’observations et d’expériences qui demandait beaucoup de temps. J’avais fait connaissance avec M. Needham, fort connu de tous les naturalistes par les excellentes observations microscopiques qu’il a fait imprimer en 1745. Cet habile homme, si recommandable par son mérite, m’avait été recommandé par M. Folkes, président de la Société royale de Londres. M’étant lié d’amitié avec lui, je crus que je ne pouvais mieux faire que de lui communiquer mes idées, et comme il avait un excellent microscope, plus commode et meilleur qu’aucun des miens, je le priai de me le prêter pour faire mes expériences ; je lui lus toute la partie de mon ouvrage qu’on vient de voir, et en même temps je lui dis que je croyais avoir trouvé le vrai réservoir de la semence dans les femelles, que je ne doutais pas que la liqueur contenue dans la cavité du corps glanduleux ne fût la vraie liqueur séminale des femelles, que j’étais persuadé qu’on trouverait dans cette liqueur, en l’observant au microscope, des animaux spermatiques comme dans la semence des mâles, et que j’étais très fort porté à croire qu’on trouverait aussi des corps en mouvement dans les parties les plus substantielles des végétaux, comme dans tous les germes des amandes des fruits, dans le nectareum, etc., et qu’il y avait grande apparence que ces animaux spermatiques, qu’on avait découverts dans les liqueurs séminales du mâle, n’étaient que le premier assemblage des parties organiques qui devaient être en bien plus grand nombre dans cette liqueur que dans toutes les autres substances qui composent le corps animal. M. Needham me parut faire cas de ces idées, et il eut la bonté de me prêter son microscope ; il voulut même être présent à quelques-unes de mes observations. Je communiquai en même temps à MM. Daubenton, Gueneau et Dalibard mon système et mon projet d’expériences, et quoique je sois fort exercé à faire des observations et des expériences d’optique, et que je sache bien distinguer ce qu’il y a de réel ou d’apparent dans ce que l’on voit au microscope, je crus que je ne devais pas m’en fier à mes yeux seuls, et j’engageai M. Daubenton à m’aider ; je le priai de voir avec moi. Je ne puis trop publier combien je dois à son amitié d’avoir bien voulu quitter ses occupations ordinaires pour suivre avec moi pendant plusieurs mois les expériences dont je vais rendre compte ; il m’a fait remarquer un grand nombre de choses qui m’auraient peut-être échappé.