Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 2.djvu/177

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cette queue est tortillée si exactement autour de leur corps, que cela leur donne la figure d’un globule. Ceci ne doit-il pas nous porter à croire que Leeuwenhoek n’a fixé ses yeux que sur les corps mouvants auxquels il voyait des queues ; qu’il ne nous a donné la description que des corps mouvants qu’il a vus dans cet état ; qu’il a négligé de nous les décrire lorsqu’ils étaient sans queues, parce qu’alors, quoiqu’ils fussent en mouvement, il ne les regardait pas comme des animaux, et c’est ce qui fait que presque tous les animaux spermatiques qu’il a dépeints se ressemblent, et qu’ils ont tous des queues, parce qu’il ne les a pris pour de vrais animaux que lorsqu’ils sont en effet dans cet état, et que quand il les a vus sous d’autres formes il a cru qu’ils étaient encore imparfaits, ou bien qu’ils étaient près de mourir, ou même qu’ils étaient morts. Au reste, il paraît par mes observations que bien loin que le prétendu animalcule déploie sa queue, d’autant plus qu’il est plus en état de nager, comme le dit ici Leeuwenhoek, il perd au contraire successivement les parties extrêmes de sa queue à mesure qu’il nage plus promptement, et qu’enfin cette queue, qui n’est qu’un corps étranger, un filet que le corps en mouvement traîne, disparaît entièrement au bout d’un certain temps.

Dans un autre endroit (t. III, p. 93) Leeuwenhoek, en parlant des animaux spermatiques de l’homme, dit : « Aliquandò etiam animadverti inter animalcula particulas quasdam minores et subrotundas, cùm verò se ea aliquoties eo modo oculis meis exhibuerint, ut mihi imaginer eas exiguis instructas esse caudis, cogitare cœpi an non hæ fortè particulæ forent animalcula recens nata ; certum enim mihi est ea etiam animalcula per generationem provenire, vel ex mole minuscula ad adultam procedere quantitatem : et quis scit an non ea animalcula, ubi moriuntur, aliorum animalculorum nutrioni atque augmini inserviant ? » Il paraît, par ce passage, que Leeuwenhoek a vu dans la liqueur séminale des animaux sans queues aussi bien que des animaux avec des queues, et qu’il est obligé de supposer que ces animaux qui n’avaient point de queues étaient nouvellement nés et n’étaient point encore adultes. J’ai observé tout le contraire, car les corps en mouvement ne sont jamais plus gros que lorsqu’ils se séparent du filament, c’est-à-dire lorsqu’ils commencent à se mouvoir et lorsqu’ils sont entièrement débarrassés de leur enveloppe, ou, si l’on veut, du mucilage qui les environne ; ils sont plus petits, et d’autant plus petits qu’ils demeurent plus longtemps en mouvement. À l’égard de la génération de ces animaux, de laquelle Leeuwenhoek dit dans cet endroit qu’il est certain, je suis persuadé que toutes les personnes qui voudront se donner la peine d’observer avec soin les liqueurs séminales trouveront qu’il n’y a aucun indice de génération d’animal par un autre animal, ni même d’accouplement ; tout ce que cet habile observateur dit ici est avancé sur de pures suppositions ; il est aisé de le lui prouver en ne se servant que de ses propres observations : par exemple,