Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 2.djvu/178

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il remarque fort bien (t. III, p. 98) que les laites de certains poissons, comme du cabillaud, se remplissent peu à peu de liqueur séminale, et qu’ensuite après que le poisson a répandu cette liqueur, ces laites se dessèchent, se rident et ne sont plus qu’une membrane sèche et dénuée de toute liqueur. « Eo tempore, dit-il, quo asellus major lactes suos misit, rugæ illæ, seu tortiles lactium partes, usque adeò contrahuntur, ut nihil præter pelliculas seu membranas esse videantur. » Comment entend-il donc que cette membrane sèche, dans laquelle il n’y a plus ni liqueur séminale ni animaux, puisse reproduire des animaux de la même espèce l’année suivante ? S’il y avait une vraie génération dans ces animaux, c’est-à-dire si l’animal était produit par l’animal, il ne pourrait pas y avoir cette interruption qui, dans la plupart des poissons, est d’une année entière ; aussi pour se tirer de cette difficulté il dit un peu plus bas : « Necessario statuendum erit, ut asellus major semen suum emiserit, in lactibus etiamnum multùm materiæ seminalis gignendis animalculis aptæ remansisse, ex quâ materiâ plura oportet provenire animalcula seminalia quàm anno proximè elapso emissa fuerant. » On voit bien que cette supposition, qu’il reste de la matière séminale dans les laites pour produire les animaux spermatiques de l’année suivante, est absolument gratuite, et d’ailleurs contraire aux observations par lesquelles on reconnaît évidemment que la laite n’est, dans cet intervalle, qu’une membrane mince et absolument desséchée. Mais comment répondre à ce que l’on peut opposer encore ici en faisant voir qu’il y a des poissons, comme le calmar, dont non seulement la liqueur séminale se forme de nouveau tous les ans, mais même le réservoir qui la contient, la laite elle-même ? Pourra-t-on dire alors qu’il reste dans la laite de la matière séminale pour produire les animaux de l’année suivante, tandis qu’il ne reste pas même de laite, et qu’après l’émission entière de la liqueur séminale, la laite elle-même s’oblitère entièrement et disparaît, et que l’on voit sous ses yeux une nouvelle laite se former l’année suivante ? Il est donc très certain que ces prétendus animaux spermatiques ne se multiplient pas, comme les autres animaux, par les voies de la génération, ce qui seul suffirait pour faire présumer que ces parties qui se meuvent dans les liqueurs séminales ne sont pas de vrais animaux. Aussi Leeuwenhoek qui, dans l’endroit que nous venons de citer, dit qu’il est certain que les animaux spermatiques se multiplient et se propagent par la génération, avoue cependant dans un autre endroit (t. Ier, p. 26) que la manière dont se produisent ces animaux est fort obscure, et qu’il laisse à d’autres le soin d’éclaircir cette matière : « Persuadebam mihi, dit-il (en parlant des animaux spermatiques du loir), hæcce animalcula ovibus prognasci, quia diversa in orbem jacentia et in semet convoluta videbam ; sed unde, quæso, primam illorum originem derivabimus ? An animo nostro concipiemus horum animalculorum semen jam procreatum esse in ipsâ generatione, hocque semen tam diù in testiculis