Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 2.djvu/180

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(t. III, p. 306) qu’une année il ne put trouver dans la liqueur séminale tirée de la laite d’un cabillaud des animaux vivants ; tout cela venait de ce qu’il voulait trouver des queues à ces animaux, et que quand il voyait de petits corps en mouvement et qui n’avaient que la forme de petits globules, il ne les regardait pas comme des animaux ; c’est cependant sous cette forme qu’on les voit le plus généralement, et qu’ils se trouvent le plus souvent dans les substances animales ou végétales. Il dit, dans le même endroit, qu’ayant pris toutes les précautions possibles pour faire voir à un dessinateur les animaux spermatiques du cabillaud, qu’il avait lui-même vus si distinctement tant de fois, il ne put jamais en venir à bout : « Non solùm, dit-il, ob eximiam eorum exilitatem, sed etiam quòd eorum corpora adeò essent fragilia, ut corpuscula passim dirumperentur ; unde factum fuit ut nonnisi rarò, nec sine attentissimâ observatione animadverterem particulas planas atque ovorum in morem longas, in quibus ex parte caudas dignoscere licebat ; particulas has oviformes existimavi animalcula esse dirupta, quòd particulæ hæ diruptæ quadruplò ferè viderentur majores corporibus animalculorum vivorum. » Lorsqu’un animal, de quelque espèce qu’il soit, cesse de vivre, il ne change pas, comme ceux-ci, subitement de forme ; de long comme un fil il ne devient pas rond comme une boule ; il ne devient pas non plus quatre fois plus gros après sa mort qu’il ne l’était pendant sa vie ; rien de ce que dit ici Leeuwenhoek ne convient à des animaux ; tout convient, au contraire, à des espèces de machines qui, comme celles du calmar, se vident après avoir fait leurs fonctions. Mais suivons encore cette observation : il dit qu’il a vu ces animaux spermatiques du cabillaud sous des formes différentes, « multa apparebant animalcula sphæram pellucidam repræsentantia » ; il les a vus de différentes grosseurs, « hæc animalcula minori videbantur mole, quàm ubi eadem antehac in tubo vitreo rotundo examinaveram ». Il n’en faut pas davantage pour faire voir qu’il n’y a point ici d’espèce ni de forme constante, et que par conséquent il n’y a point d’animaux, mais seulement des parties organiques en mouvement qui prennent en effet, par leurs différentes combinaisons, des formes et des grandeurs différentes. Ces parties organiques mouvantes se trouvent en grande quantité dans l’extrait et dans les résidus de la nourriture : la matière qui s’attache aux dents, et qui, dans les personnes saines, a la même odeur que la liqueur séminale, doit être regardée comme un résidu de la nourriture ; aussi y trouve-t-on une grande quantité de ces prétendus animaux, dont quelques-uns ont des queues et ressemblent à ceux de la liqueur séminale. M. Baker en a fait graver quatre espèces différentes, dont aucune n’a de membres, et qui toutes sont des espèces de cylindres, d’ovales, ou de globules sans queues, ou de globules avec des queues : pour moi je suis persuadé, après les avoir examinées, qu’aucune de ces espèces ne sont de vrais animaux, et que ce ne sont, comme dans la semence, que les parties orga-