Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 2.djvu/212

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

corps glanduleux des testicules contiennent la liqueur séminale, laquelle distille continuellement sur la matrice, ne produisent pas d’elles-mêmes des femelles, parce que cette liqueur qui a, comme celle du mâle, avec le corps de l’individu qui la produit, une très grande analogie, est repompée par les parties du corps de la femelle, et que, comme cette liqueur est en mouvement, et, pour ainsi dire en circulation continuelle, il ne peut se faire aucune réunion, aucun établissement local des parties qui doivent former une femelle, parce que la force qui doit opérer cette réunion n’est pas aussi grande que celle qu’exerce le corps de l’animal pour repomper et s’assimiler ces molécules qui en ont été extraites, mais qu’au contraire, lorsque les liqueurs séminales sont mêlées, elles ont entre elles plus d’analogies qu’elles n’en ont avec les parties du corps de la femelle où se fait le mélange, et que c’est par cette raison que la réunion ne s’opère qu’au moyen de ce mélange, nous pourrons par cette réponse avoir satisfait à une partie de la question. Mais, en admettant cette explication, on pourra me demander encore pourquoi la manière ordinaire de génération dans les animaux n’est-elle pas celle qui s’accorde le mieux avec cette supposition ? car il faudrait alors que chaque individu produisît comme produisent les limaçons, que chacun donnât quelque chose à l’autre également et mutuellement, et que chaque individu remportant les molécules organiques que l’autre lui aurait fournies, la réunion s’en fît d’elle-même et par la seule force d’affinité de ces molécules entre elles, qui, dans ce cas, ne serait plus détruite par d’autres forces comme elle l’était dans le corps de l’autre individu. J’avoue que si c’était par cette seule raison que les molécules organiques ne se réunissent pas dans chaque individu, il serait naturel d’en conclure que le moyen le plus court pour opérer la reproduction des animaux serait celui de leur donner les deux sexes en même temps, et que par conséquent nous devrions trouver beaucoup plus d’animaux doués des deux sexes, comme sont les limaçons, que d’autres animaux qui n’auraient qu’un seul sexe ; mais c’est tout le contraire, cette manière de génération est particulière aux limaçons et à un petit nombre d’autres espèces d’animaux ; l’autre où la communication n’est pas mutuelle, où l’un des individus ne reçoit rien de l’autre individu et où il n’y a qu’un individu qui reçoit et qui produit, est au contraire la manière la plus générale et celle que la nature emploie le plus souvent. Ainsi cette réponse ne peut satisfaire pleinement à la question qu’en supposant que c’est uniquement faute d’organes que le mâle ne produit rien, que ne pouvant rien recevoir de la femelle, et que n’ayant d’ailleurs aucun viscère propre à contenir et à nourrir le fœtus, il est impossible qu’il produise comme la femelle qui est douée de ces organes.

On peut encore supposer que, dans la liqueur de chaque individu, l’activité des molécules organiques qui proviennent de cet individu a besoin d’être contre-balancée par l’activité ou la force des molécules d’un autre individu,