Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 2.djvu/298

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dans l’économie animale proprement dite ces facultés qui appartiennent aussi au végétal, et c’est par cette raison que nous avons traité de la nutrition, du développement, de la reproduction, et même de la génération des animaux, avant que d’avoir traité de ce qui appartient en propre à l’animal, ou plutôt de ce qui n’appartient qu’à lui.

Ensuite, comme on comprend dans la classe des animaux plusieurs êtres animés dont l’organisation est très différente de la nôtre et de celle des animaux dont le corps est à peu près composé comme le nôtre, nous devons éloigner de nos considérations cette espèce de nature animale particulière, ne nous attacher qu’à celle des animaux qui nous ressemble le plus : l’économie animale d’une huître, par exemple, ne doit pas faire partie de celle dont nous avons à traiter.

Mais comme l’homme n’est pas un simple animal, comme sa nature est supérieure à celle des animaux, nous devons nous attacher à démontrer la cause de cette supériorité, et établir, par des preuves claires et solides, le degré précis de cette infériorité de la nature des animaux, afin de distinguer ce qui n’appartient qu’à l’homme de ce qui lui appartient en commun avec l’animal.

Pour mieux voir notre objet, nous venons de le circonscrire, nous en avons retranché toutes les extrémités excédantes, et nous n’avons conservé que les parties nécessaires. Divisons-le maintenant pour le considérer avec toute l’attention qu’il exige, mais divisons-le par grandes masses : avant d’examiner en détail les parties de la machine animale et les fonctions de chacune de ces parties, voyons en général le résultat de cette mécanique, et sans vouloir d’abord raisonner sur les causes, bornons-nous à constater les effets.

L’animal a deux manières d’être, l’état de mouvement et l’état de repos, la veille et le sommeil, qui se succèdent alternativement pendant toute la vie[NdÉ 1] : dans le premier état, tous les ressorts de la machine animale sont en action ; dans le second, il n’y en a qu’une partie, et cette partie, qui est en action pendant le sommeil, est aussi en action pendant la veille. Cette partie est donc d’une nécessité absolue, puisque l’animal ne peut exister d’aucune façon sans elle ; cette partie est indépendante de l’autre, puisqu’elle agit seule ; l’autre, au contraire, dépend de celle-ci, puisqu’elle ne peut seule exercer son action : l’une est la partie fondamentale de l’économie animale, puisqu’elle agit continuellement et sans interruption ; l’autre est une partie moins essentielle, puisqu’elle n’a d’exercice que par intervalles et d’une manière alternative.

  1. Sous les termes « état de veille » et « état de sommeil » dont Buffon fait usage ici, sans doute dans le but de rendre sa pensée plus saisissable aux gens du monde en vue desquels il se plaît à habiller ses exposés les plus rigoureusement scientifiques, sous ces termes, dis-je, le savant naturaliste expose les caractères qui différencient la vie végétative de la vie de relation.