Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 2.djvu/303

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même, qui diffèrent si fort des autres animaux par le centre de l’économie animale, ont une partie dans la tête, analogue au cerveau, et des sens dont les fonctions sont semblables à celles des autres animaux ; et ceux qui, comme les huîtres, paraissent en être privés, doivent être regardés comme des demi-animaux, comme des êtres qui font la nuance entre les animaux et les végétaux[NdÉ 1].

Le cerveau et les sens forment donc une seconde partie essentielle à l’économie animale[NdÉ 2] : le cerveau est le centre de l’enveloppe, comme le cœur est le centre de la partie intérieure de l’animal. C’est cette partie qui donne à toutes les autres parties extérieures le mouvement et l’action, par le moyen de la moelle de l’épine et des nerfs, qui n’en sont que le prolongement ; et de la même façon que le cœur et toute la partie intérieure communiquent avec le cerveau et avec toute l’enveloppe extérieure par les vaisseaux sanguins qui s’y distribuent, le cerveau communique aussi avec le cœur et toute la partie intérieure par les nerfs qui s’y ramifient. L’union paraît intime et réciproque ; et, quoique ces ceux organes aient des fonctions absolument différentes les unes des autres lorsqu’on les considère à part, ils ne peuvent cependant être séparés sans que l’animal périsse à l’instant.

Le cœur et toute la partie intérieure agissent continuellement, sans interruption, et, pour ainsi dire, mécaniquement et indépendamment d’aucune cause extérieure ; les sens au contraire et toute l’enveloppe n’agissent que par intervalles alternatifs, et par des ébranlements successifs causés par les objets extérieurs. Les objets exercent leur action sur les sens ; les sens modifient cette action des objets et en portent l’impression modifiée dans le cerveau, où cette impression devient ce que l’on appelle sensation ; le cerveau, en conséquence de cette impression, agit sur les nerfs et leur communique l’ébranlement qu’il vient de recevoir, et c’est cet ébranlement qui produit le mouvement progressif et toutes les autres actions extérieures du corps et des membres de l’animal. Toutes les fois qu’une cause agit sur un corps, on sait que ce corps agit lui-même par sa réaction sur cette cause : ici les objets agissent sur l’animal par le moyen des sens, et l’animal réagit sur les objets par ses mouvements extérieurs[NdÉ 3] ; en général l’action est la cause, et la réaction l’effet.

  1. Nous avons déjà dit que les huîtres ne sont pas aussi simples que le pensait Buffon. Elles ont un système nerveux assez développé, un appareil du toucher assez sensible,  etc.
  2. Il existe des animaux dépourvus de système nerveux et d’organes spéciaux des sens qui, cependant, se montrent sensibles non seulement aux chocs, aux irritations chimiques,  etc., mais encore à la chaleur, à la lumière, au son. Les Infusoires se montrent sensibles aux mêmes rayons lumineux que l’homme. Il en est de même des végétaux. (Voyez mon Introduction.)
  3. Observation très juste. Buffon réduit, avec raison, les phénomènes de sensibilité et de mouvement à de simples actions et réactions purement mécaniques.