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nouvelle au torrent qui va bientôt nous submerger, nous et notre langue, si nous n’y opposons sans retard une digue infranchissable.

Nous sommes infestés par l’anglicisme ; l’anglicisme nous déborde, nous inonde, nous défigure et nous dénature. Ce qui pis est, c’est que nous ne nous en doutons pas la moitié du temps, et pis encore, c’est que nous refusons même, dans l’occasion, de reconnaître ces anglicismes, quand ils nous sont signalés. Nous sommes tellement habitués au mélange des deux langues, française et anglaise, que nous ne faisons plus de différence et que nous ne reconnaissons plus le caractère, la nature propre de chacune d’elles.

Qu’on ne croie pas que j’exagère. Je vais incontinent donner à profusion, à discrétion, des exemples de ce que j’avance, bien malgré moi, mais avec la détermination de démontrer par ces exemples jusqu’à quel point il est temps pour nous d’en finir avec ce langage et ce style incompréhensibles dans une foule de cas, de nous en corriger par la lecture des maîtres et l’étude sérieuse d’une langue que nous avons pour mission, non seulement de conserver, mais encore de propager sur ce vaste continent américain qui nous appartient tout autant, sinon plus, qu’aux autres races. Sur ce continent en quelque sorte illimité, nous nous développons comme élément national distinct. Il convient qu’à ce développement pure-