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naux. En attendant, je suis déterminé à travailler pour ma part à diminuer le ridicule qui s’attache à nous, et, pour cela, je dirai les vérités les plus grosses et les plus difficiles à avaler. Je veux absolument convaincre mes lecteurs de la nécessité absolue d’une croisade, non seulement contre le barbarisme, contre le jargon qui souille et dénature notre belle langue, mais encore et surtout contre les barbares qui se ruent avec des pioches dans le journalisme canadien.

II

Croira-t-on que les citations que j’ai faites plus haut soient des exceptions, par hasard ? Hélas ! hélas ! elles constituent bien plutôt la règle, et je pourrais en étaler à profusion sous les yeux du lecteur, si cela n’était pas si pénible, si je voulais railler et m’amuser aux dépens des imbéciles, au lieu de faire une œuvre utile et d’avoir surtout en vue le profit à tirer du spectacle de nos misères. Je n’ai pas entrepris une tâche ingrate pour un frivole et inutile amusement, mais pour toucher du doigt un mal profond et pour convaincre tous les amis de la nationalité franco-canadienne qu’ils ont un devoir impérieux et pressant à remplir s’ils veulent sauver du naufrage notre langue et nous maintenir, en présence des autres peuples, dans une attitude au moins convenable.