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barbares qui se soient jamais introduit chez M. Molière ou chez M. Fénelon. Enfin ! que voulez-vous ?

Mais que dire de résignation ?

Donner sa résignation !…… Un tel a résigné…… Mon Dieu ! étendez votre miséricorde sur mes compatriotes, car ils ne pourront plus à l’avenir endurer leurs maux ; ils n’ont plus de résignation ; ils l’ont donnée ! Ils ne pourront pas non plus se résigner, puisqu’ils ne connaissent pas cela ; ils passent leur temps à « résigner. » Mille tonnerres ! Me montrera-t-on enfin quelqu’un qui m’apprenne ce que cela veut dire « résigner » ? Je sais très-bien ce que c’est que de se démettre, donner sa démission, prendre sa retraite, résigner un bénéfice, une fonction ou une charge quelconque en faveur de quelqu’un, mais donner sa résignation !  ! À qui diable voulez-vous donner ça, votre résignation ? Vous en avez donc trop, ou bien jugez-vous qu’elle vous soit inutile, elle qui seule peut vous aider à supporter vos chagrins, vos ennuis, vos tribulations, enfin, dans cette vallée de larmes où le carême revient systématiquement tous les ans, avec accompagnement de poisson pris du temps de Noé et vendu pour du poisson frais, sur le marché Montcalm ? Après tout, c’est votre affaire. Donnez votre résignation si vous voulez ; il ne manquera pas de gens qui la prendront, parce qu’ils en ont bien besoin, moi tout le premier.