Page:Buies - Au portique des Laurentides, 1891.djvu/27

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
28
UNE PAROISSE MODERNE

au moins étonnante, tant il est vrai que, de nos jours, il n’y a plus rien d’étonnant, si ce n’est qu’il y ait encore des gens qui s’étonnent.

Peuple conquis, formés à la dépendance sous plus d’une forme, toujours tenus sous une tutelle ou sous une autre, repoussés systématiquement en toute occasion à l’arrière-plan, élevés et maintenus dans une absence presque absolue d’initiative, loin de tout souffle extérieur et comme isolés dans le monde moderne, les Canadiens avaient vu s’effacer leur caractère national, l’individualisme et la volonté propre qui distinguent les peuples libres.

Ils se savaient et ils se sentaient traînés à la remorque, et ils se considéraient eux-mêmes comme en dehors du mouvement général. Que de fois n’a-t-on pas entendu répéter des phrases qui impliquent un aveu personnel d’infériorité, comme celles-ci et d’autres semblables : « Pour un petit canadien, ça n’est pas trop mal, n’est-ce pas ? — Ah ! cela est bon dans les vieux pays… ; mais ici, dans le p’tit Canada !… Des savants,