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UNE PAROISSE MODERNE

cercle étroit d’une éducation puérile, pour pouvoir s’installer dans notre pays et s’y développer comme dans les autres. Nous étions prêts pour cette évolution brusque et fatale, mais sans nous en rendre compte ; nous étions mûrs sans le savoir. Quiconque, il y a vingt-cinq ans, eût parlé seulement d’un chemin de fer dans l’intérieur du nord laurentien, eût été regardé à coup sûr comme un halluciné et chrétiennement enfermé dans le plus prochain asile, soumis indifféremment à n’importe quel contrôle médical.

Aujourd’hui, ce n’est pas tout à fait le contraire, mais presque. On n’a pas plus tôt vu fonctionner une ligne à travers les Laurentides, qu’on veut percer le nord dans toutes les directions ; on pousse des chemins de fer, comme de simples pions sur un jeu d’échecs, à travers la région la plus montagneuse du pays, celle du Saguenay ; on va traverser celle du Saint-Maurice comme une éponge, aborder le Témiscamingue et la baie d’Hudson elle-même, qui n’est qu’une station sur le chemin du pôle, et s’élancer, d’un autre côté, à toute vitesse, jusqu’au rivage labradorien. Aujourd’hui, loin qu’on trouve insensé le projet d’un chemin de fer jusqu’au Labrador, on est bien près de traiter d’arriéré ou de déclassé celui qui trouve cette entreprise