Page:Buies - Au portique des Laurentides, 1891.djvu/43

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
44
UNE PAROISSE MODERNE

aussi horrible, aussi imprévu que celui de la foudre, sans le choc des nuages, vient d’éclater sur moi, en ouvrant et en déchirant violemment tous les cœurs canadiens !…

LE CURÉ LABELLE EST MORT ! !

En un jour, en une heure, je perds le meilleur ami que j’aie eu en ce monde, un frère plus cher que si nous avions eu une même mère tous deux. Je perds celui dont, depuis dix ans, je suis le confident intime, un homme qui avait pour moi une affection profonde, cent fois mise à l’épreuve, qui m’avait adopté pour compléter son œuvre, qui s’ouvrait à moi dans le détail de tous ses grands projets, qui m’initiait à toutes ses conceptions, afin qu’à mon tour je vinsse les exposer au public et les faire valoir avec leur véritable physionomie, souvent défigurée par des esprits faux ou superficiels ; je perds un homme que j’ai rarement quitté sans en être l’objet de quelque bonté nouvelle, ou sans rester confondu, après des heures d’entretien, de la grandeur et de la largeur de son esprit. Je l’aimais avec toute mon âme, encore plus que je ne l’admirais, et aujourd’hui que mon esprit a retrouvé un peu de ce calme, qu’il lui eût été inutile de chercher dans les premiers jours, je sens sa perte plus que