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LE CURÉ LABELLE

contracté cette sorte de gastrite chronique qui a assombri et enfiévré le dernier terme de sa vie. Quels ravages homériques ! Il dévastait une table entière et réduisait tous les plats à n’être bientôt plus que des fantômes. Puis il se mettait à causer. Oh ! c’était dans ces moments-là qu’il fallait l’entendre ! Il parlait de tout, abordait tous les sujets, faisait résonner ses éclats de voix jusqu’aux dernières retraites du presbytère et mettait tout le monde en une humeur superbe de s’élancer avec lui à la conquête des confins les plus septentrionaux. Il adorait alors d’entendre ou de raconter les histoires les plus abracadabrantes ou les plus burlesques. Cela lui était égal : ce grand penseur, ce grand faiseur de régions, ce grand apôtre était en même temps un grand rieur, et son large et puissant rire retentissait comme un éboulis dans les montagnes.




Puis il se mettait à fumer, des heures, des heures, des heures ! Et le curé parlait toujours ! cela principalement lorsqu’on l’avait mis sur ses sujets de prédilection. Petit à petit l’apparte-