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LE CURÉ LABELLE

sération, et voilà pourquoi les opinions les plus condamnables, les sophismes les plus dangereux pouvaient se donner libre cours devant lui ; il admettait tout ce que l’on voulait et répondait ensuite par l’énonciation large, lumineuse claire et vibrante de deux ou trois grands principes fondamentaux, et par une exposition éclatante qui lui suffisait pour synthétiser en quelques pages toute la doctrine religieuse et toute l’histoire du monde. Esprit éminemment d’ensemble, il embrassait et rassemblait toutes les questions sous sa pensée comme l’aigle, au sommet des airs, embrasse d’un regard les espaces qui l’entourent de toutes parts.


De même qu’il oubliait les heures, il oubliait aussi bien les repas. Que de fois ne l’ai-je pas vu ne se rappelant pas s’il avait déjeuné ou non ! Dès lors que la « bête » ne se plaignait pas éperdument et ne jetait pas des cris d’affamée, il l’ignorait. Mais en revanche, quels repas de titan il faisait quand il s’y mettait, quand il s’asseyait à table en disant : « Là, maintenant, nous allons diner. » Je l’ai vu dans son bon temps, quelques années avant sa mort, avant qu’il eût