Page:Buies - Chroniques, Tome 1, Humeurs et caprices, 1884.djvu/449

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gneusement les jambes, pour que la seule vue de cet objet servant à des divertissements profanes ne trouble pas des regards détournés de la terre.

Après les prohibitions, qui sont purement négatives et qui consistent dans l’interdiction de faire certaines choses, viendra l’obligation positive, formelle, de faire certaines autres choses, comme de ne se montrer en public qu’aux heures de l’office divin, de faire sa cuisine avant le lever du soleil, d’être debout avec les coqs, d’empêcher son chien d’aboyer, de marcher en glissant, de se laver comme les chats afin de faire le moins de bruit possible, enfin, de n’ouvrir la bouche que pour chanter des psaumes n’importe sur quel ton.

Voilà le dimanche tel qu’il sera inévitablement dans cinq ans d’ici, pour peu que nous voulions avoir autant de vertu qu’il est possible d’en montrer. Aussi, il faudra voir alors comme les gens se jetteront tête baissée dans tous les excès, afin d’échapper à l’ennui, l’ennui, ce patient tentateur auquel ne résistent guère les vertus modernes.

Or, c’est là précisément ce que nous voudrions empêcher, et, pour cela, nous allons faire à notre tour un peu de morale, car nous supposons bien que c’est au nom de la morale que se font les prohibitions dominicales, et que c’est avec des arguments prétendus moraux qu’on tourne nos conseillers de ville en vrais Dracons promenant le fer rouge dans tous les gosiers. Voyons un peu.

Une loi, pour être respectée et avoir de l’autorité, doit s’appuyer sur une nécessité, sur un besoin, soit