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CHRONIQUES

telligence à l’observance de théories surannées qui n’ont guère produit d’autre résultat que celui de présenter cette anomalie merveilleuse : un peuple jeune entièrement livré à la routine ! Pourquoi alors serions-nous trop jeunes pour nous adonner enfin aux branches d’éducation devenues indispensables ?

Quel est donc le peuple tellement enfant qu’on ne puisse l’éclairer sur ses véritables intérêts, et combien de temps encore nous tiendra-t-on dans l’impuissance avec le fantôme d’un mot ? Combien de temps faut-il à notre jeunesse pour arriver à l’âge mûr ? Il y a cependant une limite à cette tutelle, et ne se trouve-t-elle pas dans les aspirations générales, dans le besoin des réformes universellement senti ?

Si ce tableau de notre jeunesse n’a rien de séduisant ni d’agréable, je ne me rattraperai certainement pas en vous faisant celui de la vieillesse. Oh ! vieillir ! c’est une horrible chose. On se voit rider, on voit ses dents jaunir, malgré l’héroïque résistance du Philodonte, du Sozodonte et de tous les Odonte imaginables ; on se voit avec des mèches argentées qui paraissent bien plus que les autres, les infâmes ! on s’aperçoit qu’on se fane à force de mûrir ; le front dénudé se remplit de désenchantements, le cœur devient comme une vieille montre de famille qui tient encore le temps, qui bat toujours, mais qu’on n’ose plus ouvrir devant les autres. Avec cela on a des rhumatismes qui défient le Pain-killer, on se couvre de flanelles qui deviennent comme des éponges, on craint également le chaud et le