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« Nos conquérants, regardés d’un œil ombrageux et jaloux, n’inspiraient que de l’horreur et du saisissement… Nation généreuse qui nous avez fait voir avec tant d’évidence combien ces préjuges étaient faux ! Nation industrieuse qui avez fait germer les richesses que cette terre renfermait dans son sein ; nation exemplaire qui, dans ce moment de crise, enseignez à l’univers attentif en quoi consiste cette liberté après laquelle tous les hommes soupirent et dont si peu connaissent les justes bornes ; nation compatissante qui venez de recueillir avec tant d’humanité, les sujets les plus fidèles et les plus maltraités de ce royaume auquel nous appartînmes autrefois ! Nation bienfaisante qui donnez chaque jour au Canada de nouvelles preuves de votre libéralité ! Non, non, vous n’êtes pas nos ennemis. Si, après avoir goûté trente-cinq ans les douceurs de votre empire, il se trouve encore parmi nous quelques esprits assez aveugles ou assez mal intentionnés pour entretenir les mêmes ombrages, et inspirer au peuple des désirs criminels de retourner à ses anciens maîtres, n’imputez pas à la totalité ce qui n’est que le vice d’un petit nombre.

« Bien éloigné de donner dans ces erreurs, M. Briand vit à peine les armes britanniques placées sur nos portes de ville, qu’il conçut en un instant l’idée que Dieu avait transféré à l’Angleterre le domaine de ce pays ; qu’avec le changement de possesseurs, nos devoirs avaient changé d’objet ; que les liens qui nous avaient jusqu’alors unis à la France étaient rompus ; il aperçut (ce que personne ne soupçonnait !) que la religion elle-même pouvait gagner à ce changement de domination. »

Cet hommage rendu au plus fort a été la marque distinctive du clergé de tous les temps.

« L’évêque d’Avila, continue la Minerve, sur la foi de son correspondant, s’est présenté devant la junte de cette province pour adhérer « aux principes proclamés par la glorieuse révolution de septembre, » et de plus pour affirmer qu’on l’avait « calomnié » en le représentant comme un homme politique.

L’évêque de Cadix a envoyé à la junte de Grenade des explications « satisfaisantes » sur la conduite qu’il a observée pendant les premiers jours de la révolution.

Enfin, un journal d’Alicante annonce qu’une commission du clergé de cette ville s’est rendue au sein de la junte pour exprimer son adhésion au nouvel ordre de choses. »

Ce qui n’empêche pas que si le gouvernement provisoire est renversé, contre toute attente, on verra les mêmes évêques tomber d’admiration devant le gouvernement qui lui succédera.

Si le diable venait s’emparer de la terre, les évêques iraient le saluer du nom de Majesté et lui souhaiter un long règne.

La Minerve, cherchant, il y a trois mois, toute espèce de griefs contre les libéraux, découvrait que sur 72 personnes qui avaient