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« Mais comment, dira peut-être quelqu’un, une contribution si minime, quinze sous par année, pourra-t-elle suffire à des œuvres si importantes ? »

Attendez un peu ; Mgr. prépare ses batteries pour demander davantage et suppose des objections, mais il ne dit pas si elles sont inspirées. C’est essentiel pourtant.

« Comme Nous sommes sur le point de demander des soumissions à des entrepreneurs, Nous comptons que personne ne fera défaut. »

Ce n’est pas seulement aux entrepreneurs que les évêques demandent des soumissions ; jusqu’à présent, c’était à tout le monde. Les entrepreneurs feront une variante.

« Nous avons besoin du concours de tous sans exception, et nous le réclamons au nom de la gloire de Dieu, au nom des intérêts les plus chers de la religion, au nom de la conscience, qui oblige chaque fidèle à contribuer au recrutement du clergé, au logement et à l’entretien de son premier Pasteur. »

Crescendo. Voilà l’obligation maintenant. Mais pourquoi demandez-vous au lieu d’ordonner, si vos paroissiens sont obligés ?

C’est pour la gloire de Dieu ! songez-y ; il faut que ça marche.

 S’il faut encore à quelques-uns un autre motif pour exciter leur générosité, ils le trouveront dans les avantages spirituels suivants :

Une messe basse sera célébrée dans la chapelle du nouveau séminaire et dans celle du nouvel évêché, une fois par mois pendant vingt-cinq ans, (c’est long, mais ça paie si bien !) pour tous ceux qui auront régulièrement contribué de la somme demandée. »

Et à ceux qui n’auront pas contribué on refusera l’absolution.

« Ces entreprises importantes, (Importantes ! hein !) Nous les mettons humblement sous la protection de la très-sainte Vierge, (La sainte Vierge a pas mal d’ouvrage de ce temps-ci. Il y a tant d’évêques qui mendient sous sa protection, qu’elle pourrait bien se tanner. Mais enfin, en lui rafraîchissant le souvenir…) convaincu que cette bonne et tendre Mère fera réussir ces projets au-delà même de notre attente, et que, sous ses auspices, la jeunesse studieuse du Diocèse pourra, d’ici à deux ans, prendre possession du nouveau séminaire, et qu’il ne s’écoulera guère plus de deux autres années avant que l’Évêque puisse entrer dans sa nouvelle demeure . »

C’est là ce qu’il ne faut pas perdre de vue.

Je ne puis me lasser d’admirer combien on est heureux d’être évêque. On mendie, on conjure, on tond, on se fait donner quelques sous qui finissent par des piastres, et quand tout le monde est ruiné, on rejette cela sur le compte du bon Dieu, de la sainte Vierge et de l’enfant Jésus.

« Le succès de ces deux œuvres amènera d’ailleurs la réalisation d’une autre également intéressante, l’établissement d’une maison-mère et d’un noviciat pour les Sœurs de la Charité à Rimouski. (Encore ! encore de la charité ! ah ! voyons, y a un bout). C’est dans ce but que nous faisons construire une allonge à notre demeure provisoire. »