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des enfants ! Ce ne sont pas là des moyens ordinaires de bonne éducation.

M. le président raisonne mal. Il part toujours du point de vue d’une bonne éducation à donner aux enfants. Or, encore une fois, ce n’est pas cela que veulent les Jésuites. Ils ont du moins le mérite d’être conséquents ; pour élever les enfants comme des ânes, ils les accablent de coups de fouet. Il n’y a rien à dire à cela.

Second prévenu.

D. — C’est donc une habitude de votre maison que de maltraiter les enfants ? car, enfin, nous vous voyons tout un attirail d’instruments de correction, et les faits de sévices se sont multipliés à ce point que vous auriez dit au jeune de Connat qui en a déposé : « Il y en a d’autres que vous qui ont été fouettés : mais ils ne s’en vanteront pas. »

— R. Je nie avoir tenu ce propos. Il est malheureusement vrai que j’ai permis plusieurs corrections. J’ai en ceci méconnu les volontés de mon supérieur et de la règle. J’ai agi de ma propre initiative. L’année dernière, le R. P. Roux m’en fit même l’observation à deux ou trois reprises. J’ai persisté quand l’occasion me l’a suggéré, inspiré par l’intérêt des enfants. J’avoue que je me suis trompé et je le déplore. (Le moyen de se fâcher contre un homme pareil !)

D. — Dès 1863, ces habitudes semblent avoir été celles de la maison, puisque le jeune Maydieu, à cette époque, a été appréhendé et fouetté, sur l’ordre du sous-préfet des études, par un homme armé d’un bâton et masqué.

— R. Non, monsieur, ce n’étaient pas les habitudes de la maison. Le fait que vous citez m’est étranger, et je puis dire que ces corrections ont été introduites par moi contre la volonté du R. P. Roux, qui les ignorait ou les blâmait.

M. le président : Monsieur Roux, dites-nous vos nom, prénoms et qualités, et fournissez telles explications qu’il vous plaira. Vous êtes assigné comme civilement responsable des actes de vos subordonnés.

— R. Je me nomme Jean Roux, âgé de quarante ans, recteur de l’école de Tivoli. Je n’ai aucune explication à fournir, sinon que j’ai ignoré les faits qui vous sont soumis lorsqu’ils ont eu lieu, et que, quand je les ai connus, je les ai blâmés et désavoués, comme contraires à notre règle et à ma volonté. Je dois ajouter toutefois que je ne doute pas des intentions de mes subordonnés qui, en se trompant, ils le reconnaissent aujourd’hui, ont toujours agi en vue de ce qu’ils croyaient être l’intérêt des enfants..

L’intérêt des enfants est d’avoir les fesses comme des pommes cuites, excepté de Montfort, toujours, sur qui les coups de fouet ne font pas plus d’effet que les rails des patins sur la glace.