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LA LANTERNE


No 21




Il faut jeter aujourd’hui un regard sur le monde.

Je ne parlerai pas de l’Espagne où, il y a trois mois à peine, on ne concevait même pas que les protestants pussent avoir un temple à eux ; je ne parlerai pas de l’Italie étouffée depuis des siècles sous l’épais capuchon des moines, où la régénération n’est possible que par un radicalisme qui ne comptera pas les plaies et ne s’effraiera pas de la grandeur des sacrifices ; je ne parlerai pas du Pérou, du Mexique, de Cuba, de toutes les anciennes colonies espagnoles enfin, où l’anarchie règne en permanence, résultat d’une longue tutelle religieuse ; je ne citerai pas ces exemples qui se présentent d’eux-mêmes à l’observation, mais je vais mettre en vue des pays de colons comme le nôtre, offrant avec le Canada des analogies saisissantes, et l’on jugera.

L’Île Madère, colonie portugaise sur les côtes d’Afrique, fut découverte en 1412, il y a déjà quatre siècles et demi.

Au commencement du 17e siècle, les couvents, se multipliant et s’enrichissant sans cesse, accaparèrent une grande partie des terres cultivées. Celles qui échappèrent à la main-morte furent grevées de droits nommés vinculos, que les mourants constituaient au profit des églises, à la condition qu’un certain nombre de messes seraient dites pour le salut de leur âme.

Ces vinculos non seulement enlevaient une partie du produit net, mais avaient pour effet de limiter toute location à quatre années, et de réduire ainsi les cultivateurs à un état très voisin du servage.

La révolution de 1821 supprima tous les couvents, moins trois.

La population de Madère diminue, elle est aujourd’hui d’environ 75,000 âmes. C’est en vain que le gouvernement portugais y a