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mais les fêtes véritables, celles du foyer à certaines heures inattendues, les fêtes qui, seules, contiennent du bonheur et qui sont les vôtres, uniquement les vôtres, les a-t’il jamais connues ? les connaîtra-t’il jamais ? Ces joies profondes et intimes, où aucun regard étranger ne pénètre, dont l’affection est la base et qui n’ont besoin de rien en dehors d’elles pour être complètes, il n’a pas même l’espoir de jamais les goûter tout en les comprenant ! À lui seul elles sont interdites, non pas tant qu’il l’ait voulu que parce qu’il les a trop désirées peut-être, et qu’il en a ambitionné une part plus forte que ce qu’aucune femme pouvait lui offrir. Il a élevé trop haut ses vœux, et maintenant il n’a plus le droit d’en former aucun ; le moindre de ses vœux serait aujourd’hui dédaigné et il ne lui reste plus qu’à se tenir à l’écart, condamné pour toujours par le bonheur des autres.



Pauvre hère, trop longtemps resté à l’affût, maintenant au rebut ! Il n’a même pas d’âge, car il a vécu les années que le ciel lui avait données pour le bonheur ; le reste ne compte pas. Il n’a pas de foyer, ou bien ce foyer est désert, comme le bois que les oiseaux ont fui, comme le rivage qui n’a plus de murmures. Jamais l’ange n’y vient étendre ses blanches ailes ni jeter un rayon de son sourire.