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Provence, et ce sont surtout les avocats et les marchands qui en sont affligés ; car on parle dans nos campagnes un français beaucoup plus pur que celui qui est parlé au sein des villes, parmi la classe réputée instruite.

C’est parce que nous n’avons pas le génie de la langue française que tant de nos écrivains ressassent invariablement les mêmes choses, tournent et retournent avec une allure uniforme dans le même cercle monotone d’idées vieillottes, qu’ils croient rajeunir en les habillant avec une défroque qui ne change jamais. Qu’on fasse, si l’on veut, un livre qui n’a en soi ni fonds ni portée, encore faut-il qu’il soit une des formes du mouvement intellectuel, qu’il indique le culte de l’art par l’éclat et le choix des expressions, qu’on y reconnaisse le véritable homme de lettres et qu’on puisse l’admirer dans une production à tous autres points de vue stérile. Il y a des centaines d’œuvres qui sont ainsi devenues immortelles et qui, cependant, semblent n’offrir à l’esprit aucun objet à étudier, qui sont de pure fantaisie, mais qui attestent aux yeux du connaisseur de longues et patientes études, et toutes les ressources de l’art mises au service d’une création futile en apparence. Il y a loin de là à ces essais puériles et présomptueux dont on inonde le domaine de notre littérature comme si ce do-