Page:Buies - Petites chroniques pour 1877, 1878.djvu/40

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silence de mort semblait s’être répandu dans ce grand cadavre de plâtre et de mortier ; aucun bruit ne passait par les trous informes de ses murs que fermaient autrefois des fenêtres, et tout à coup l’on vit paisiblement sortir, par quatre à cinq cheminées différentes, l’honnête fumée du pot-au-feu que préparaient comme d’habitude les derniers venus sous ce toit qui menace toujours et qui ne croule pas.

C’est ce qui fait le désespoir du gouvernement local. Il n’ose toucher au collège, « propriété de l’Église, » a dit solennellement M. de Boucherville ; mais comme une poussière, même sacrée, peut se disperser au vent ; comme le plus inviolable des murs peut dégringoler lorsqu’il ne tient plus, l’hon. premier ministre a fait ce raisonnement qui le laisse irréprochable et à la fois le tire d’embarras : « Laissons, » a-t-il dit, « casser le nez à une vingtaine de citadins qui passeront à la portée du collège ; laissons-le enfiévrer, infecter la moitié de la ville, mais ne portons pas la main dessus ; ce serait un sacrilège. » De son côté le Conseil-de-ville de Québec, fort embarrassé, fort empêtré, ne sachant s’il a le droit d’empêcher un monument en ruines de démolir les gens, remué, ballotté entre des sentiments et des pressentiments, entre l’urgence et la crainte d’agir, entre la santé publique d’une part et, d’autre