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contre une oligarchie qui était l’image en Amérique des governing classes de la Grande-Bretagne. Il y a donc depuis quelques années un large envahissement, une expansion souveraine des classes populaires dans cette même Albion où, tout récemment encore, la plus grande partie du peuple appelé libre n’avait pas même droit de vote. Le général Grant, vainqueur de l’oligarchie sudiste, fût-il allé en Angleterre il y a dix ans, n’eût guère trouvé pour l’acclamer que les classes populaires, unies d’instincts, de sympathies et d’aspirations avec les hommes du nord ; mais l’Angleterre officielle fût restée dans les strictes limites de la courtoisie obligée, et l’Angleterre de la nobility et de la gentry fût restée coite, absolument étrangère à ce guerrier républicain.

À propos de la Grande-Bretagne, savez-vous bien que voilà un empire qui ne compte pas moins de 235,000,000 d’âmes ; là-dessus, il n’y a qu’un sixième de chrétiens ; c’est pour cela que la reine Victoria porte le titre de Majesté très-chrétienne. Mais en ramenant la statistique au Royaume-Uni seulement, on découvre avec stupeur que, sur une population de trente millions d’âmes, il n’y a que cent soixante huit mille propriétaires !! Dès lors, on s’explique aisément pourquoi les classes gouvernantes ont fait, jusqu’à ces années dernières, la pluie et le soleil dans ce pays où le peuple libre était partout l’esclave du sol.

C’est égal : ces Anglais sont une nation qui a l’œil ouvert et qui ne laisse rien perdre. Ils ont déjà acca-