leurs abîmes sans fond, on n’eût pas tardé à y voir plonger la France et l’Angleterre pour se disputer les écueils, les récifs et les cavernes encore humides des vagues en fuite.
Mais admirons un étrange retour de la destinée. Cette inimitié séculaire, cette soif de représailles, attisée sans cesse par de nouvelles injures à venger, ont fait place subitement à une amitié que rien n’altère et qui dure déjà depuis plus de soixante ans. Il semble que les grandes guerres du premier empire aient épuisé ce qui restait de haine dans le cœur des deux peuples ; la garde impériale, tombant à Waterloo sur un lit de mitraille, a fermé l’épopée militaire qui comptait huit siècles de combats ; sur le terrain sanglant de la dernière grande lutte, l’Angleterre et la France se sont tendu une main qui ne s’est pas desserrée depuis lors, et le monde soulagé a vu ces deux géants s’embrasser dans une étreinte qui semble désormais éternelle. Pour nous, cette paix remonte plus loin encore ; elle a aujourd’hui cent trente ans d’existence, depuis la deuxième