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LES JEUNES BARBARES

NEC PLUS ULTRA

UN MONUMENT

« Grâce aux dieux, mon ahurissement dépasse tout ce que j’ai pu rêver ! » disait Oreste à son fidèle ami Pylade[1].

Ceci n’est pas tout à fait textuel, mais ça pourrait l’être.

Il y a déjà plus de deux cents ans que Racine a mis à peu près ces paroles dans la bouche de son bouillant personnage. Je le regrette profondément pour moi, car c’est exactement, et mot à mot, ce que je me suis dit à moi-même en lisant un…, comment pourrait-on bien appeler cela ? que « La Patrie » du six décembre dernier publiait sous le titre « Comme dans la vie », et signé d’un certain docteur C., praticien étonnant que sa valeur retient à la campagne.

Depuis plusieurs années déjà je me suis habitué à voir passer sous mes yeux, sans jeter un seul cri, des énormités de toute espèce, et je croyais sincèrement en avoir trouvé la limite possible dans les productions abracadabrantes d’un groupe assez nombreux de jeunes gens, qui ont reçu évidemment pour mission de terminer notre grand siècle dans une orgie d’insanités.

  1. Dans la tragédie d’Andromaque, Oreste, fou de douleur, jette au ciel une imprécation qui commence par ce vers célèbre :
    « Grâce aux dieux, mon malheur passe mon espérance !  »